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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2025

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 143 , 144 )

N° I-1794 rect.

27 novembre 2024


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G  
Non soutenu

M. OUIZILLE


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 25


Après l'article 25

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 792 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante : 

« Art. 792. – Lorsque la valeur des biens pris en compte pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit est égale ou supérieure à 4 millions d’euros, le donataire ou l’héritier est redevable, sous réserve de l’acceptation de la donation ou de la succession, de l’impôt sur le revenu, selon les modalités prévues à l’article 200 A s’il s’agit de valeurs mobilières ou de droits sociaux et à l’article 200 B s’il s’agit de biens ou de droits mobiliers ou immobiliers, sur le montant des plus-values latentes constatées.

« Le montant desdites plus-values latentes est déterminé par différence entre la valeur des biens à la date de la transmission, déterminée selon les règles prévues aux articles 758, 759 et 761, et leur prix d’acquisition ou, en cas d’acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation.

« Le montant de l’impôt dû en application des deux alinéas précédents est minoré du montant des droits de mutation à titre gratuit acquittés par le contribuable sur les mêmes biens. 

« L’imposition des plus-values latentes peut être reportée à la demande du contribuable. Il est mis fin au report d’imposition à l’occasion de la prochaine transmission du bien à titre gratuit. 

« Le paiement de l’impôt peut être fractionné en application d’un échéancier déterminé en accord avec l’administration fiscale. Un abattement de 10 % est appliqué au montant des plus-values latentes servant de base à l’imposition lorsque l’impôt est acquitté dans un délai de dix ans à compter de la date de transmission. 

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »

II. – Au début du e du I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, après le mot : « plus-values » sont insérés les mots : « , plus-values latentes, ».

Objet

Quel monde allons-nous laisser à nos enfants et à nos petits-enfants ? Cette question résume l’inquiétude partagée par la génération du baby-boom face aux crises contemporaines : crise écologique, crise démocratique, crise économique et crise des inégalités.

Pour cette génération, le patrimoine accumulé est souvent le fruit d’une vie de labeur et constitue une bouée de sauvetage envoyée à ses enfants. Pourvoyeur de certitude dans un monde incertain, l’héritage forme aux yeux des parents le prolongement du filet de sécurité sociale. Offrant la possibilité de léguer un patrimoine, il est également perçu comme un symbole de la mobilité sociale – à la fois une espérance et un horizon. Cette double fonction, économique et symbolique, participe à l’attachement des Français à l’héritage.

Au cours des quinze prochaines années, la France connaîtra le plus grand transfert de richesse de son histoire contemporaine : plus de 9 000 milliards d’euros de patrimoine détenu par les Français les plus âgés seront transmis à leurs enfants. Ce mouvement, appelé la "Grande Transmission" (Great Wealth Transfer dans les pays anglo-saxons), est lié à la disparition progressive de la génération du baby-boom.

Cependant, la grande transmission présente un caractère extrêmement inégalitaire : 10 % des ménages détiennent 55 % du patrimoine total des Français. Si nous ne faisons rien, elle risque de rétablir une société où la fortune héritée surdétermine la position sociale des individus, et où le poids des dynasties patrimoniales l’emporte sur les résultats de l’effort et du travail, trahissant la promesse républicaine selon laquelle "les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune".

Face à ces défis, une réponse collective est indispensable. La somme d’héritages individuels que représente la grande transmission ne suffira pas à relever des défis globaux comme la crise écologique. Refusant cette fatalité, nous proposons de transformer la grande transmission en une opportunité pour financer l’avenir autour de trois priorités nationales : la transition écologique, la recherche et l’éducation.

Pour y parvenir, nous proposons un impôt sur les grandes successions (IGS) reposant sur trois piliers : 

(i) une refonte de l’assiette des droits de succession et l’instauration d’un barème plus progressif ;(ii) la taxation des plus-values latentes, pour mettre fin à l’effacement fiscal des gains non réalisés dans les transmissions du top 1 % ; (iii) une modernisation pour faciliter les transmissions au cours de la vie.

Actuellement, seuls 5 % des 400 milliards d’euros transmis annuellement sont fiscalisés, générant 20 milliards d’eurosde recettes. La réforme porterait ce taux à 9 %, permettant de mobiliser 400 milliards d’euros entre 2025 et 2040 pour financer les investissements nécessaires.

Le pilier 2, objet du présent amendement, propose de taxer les plus-values latentes des grandes transmissions et donc à corriger une anomalie fiscale. Aujourd’hui, ces plus-values latentes échappent à toute imposition au moment des transmissions, un mécanisme qui bénéficie principalement aux patrimoines les plus élevés.

Cette taxation serait déclenchée lorsque la valeur des biens transmis excède 4 millions d’euros. La base imposable sera la différence entre la valeur actuelle des biens et leur prix d’acquisition initial. Néanmoins, le paiement pourra être fractionné sur dix ans, avec un abattement de 10 % pour les paiements anticipés.

Selon nos estimations, ce dispositif pourrait générer 7 milliards d’euros dès 2025 et 159 milliards d’euros entre 2025 et 2040, tout en préservant 99 % des transmissions. 

En réaffirmant l’idéal républicain d’égalité des chances, l’IGS incarne un pacte de solidarité intergénérationnelle. Elle répondra à l’inquiétude légitime des parents tout en garantissant aux enfants un monde plus équitable, durable et prospère. 

Cet amendement a été travaillé avec le laboratoire d'idées Hémisphère gauche.

Sa rédactions constitue une base de travail qui a vocation à être améliorée et détaillée. 



NB :La rectification consiste en un changement de place de l'article additionnel après l'article 31 vers l'article additionnel après l'article 25.