Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 143 , 144 ) |
N° I-1135 20 novembre 2024 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||||||
M. JOMIER, Mmes ROSSIGNOL, LE HOUEROU et CANALÈS et MM. CHANTREL et FÉRAUD ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 10 |
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 313-31 du code des impositions sur les biens et services est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .... – Les boissons alcooliques ne peuvent être vendues à un prix toutes taxes comprises inférieur à leur prix minimum. Le prix minimum d’une boisson alcoolique est le produit du prix minimum par unité de l’alcool, du titre alcoométrique volumique de la boisson et du volume de celle-ci en litres. Une unité d’alcool correspond à 10 grammes d’alcool pur.
« Le prix minimum par unité de l’alcool est déterminé chaque année par décret après consultation de la Haute Autorité de Santé.
II. – L’accise applicable aux boissons alcooliques et mentionnée aux articles L. 313-15, L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L313-24 et L. 313-25 du code des impositions des biens et des services est réduite de 0,1 %.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Objet
Cet amendement, inspiré par la législation écossaise, vise à amorcer une réforme d’ensemble de la tarification et de la fiscalité des alcools en fixant un prix minimum par unité d’alcool aux boissons alcooliques et en abaissant la fiscalité sur les boissons dont le prix excède d’ores et déjà ce prix minimum.
Alors que l’OMS recommande depuis 2010 d’agir sur le prix afin de lutter contre les risques sanitaires liés à la consommation d’alcool, en France, huitième pays le plus consommateur d’alcool de l’OCDE, le prix des boissons alcooliques diminue relativement à celui des autres denrées alimentaires.
L’instauration en 2018 d’un prix minimum par unité d’alcool a permis à l’Écosse de diminuer significativement la consommation excessive d’alcool et la morbidité associée et ce sans effet néfaste sur les recettes du secteur. Dès 2020, était observée une réduction de 13,4% du nombre de décès directement liés à la consommation d’alcool. Pour autant, le prix minimum n’a pas eu d’effet notoire sur la consommation des personnes respectant les repères de consommation à moindre risques anglais – 14 verres par semaine.
Il s’agit donc d’une mesure qui cible particulièrement la réduction de la consommation de consommateurs les plus à risque. En France, 8% des adultes consomment la moitié de l’alcool vendu et 22% des français dépassent les seuils de consommation à moindre risque ; une telle mesure y est donc particulièrement pertinente.
Le consensus économique propose que le prix minimum d’une unité de 10 grammes d’alcool soit fixé à 50 centimes hors-inflation. Ainsi, une bouteille de vin titrant à 12° ne pourrait être vendue moins de 3,50€. Les alcools dont les prix de vente sont aujourd’hui supérieurs au prix minimum par unité d’alcool ne sont pas concernés. Pour le secteur, la compensation de la baisse en volume par l'augmentation des marges implique que les petits producteurs bénéficieront de cette mesure.
Aussi, afin de dégager des marges de manœuvre financières qui pourront faciliter l’adaptation des producteurs à une réforme globale sans conséquences notables sur le prix de vente, nous proposons d’abaisser marginalement le montant de celles-ci sur les boissons alcooliques non-concernées par le prix minimal
Au plan sanitaire, outre les bénéfices attendus en matière de réduction de la mortalité par cancers attribuable à l’alcool (22%), la mesure permettrait à horizon 2050 de réduire les dépenses de santé dans l’ensemble de 237 millions d’euros par an.
Si le prix minimum permet de préserver le secteur en comparaison d’une augmentation de la taxation, les taxes existantes demeurent nécessaires afin notamment de financer le coût de l’alcool pour la collectivité. Le supplément de taxe sur la valeur ajoutée perçu en raison de l’instauration du prix plancher sera opportunément affecté au fonds de lutte contre les addictions. L’instauration d’un prix minimum ne dispensant pas, en effet, d’une politique offensive de prévention.
La détermination d’un prix minimal de l’alcool semble constituer, au regard de l’objectif de protection de la santé qu’elle poursuit, une limitation justifiée et proportionnée à la liberté de fixation des prix.