Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2024 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 127 , 128 , 132) |
N° I-2096 rect. 23 novembre 2023 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme BLATRIX CONTAT, MM. COZIC, KANNER et RAYNAL, Mme BRIQUET, M. ÉBLÉ, Mme ESPAGNAC, MM. FÉRAUD, JEANSANNETAS et LUREL, Mmes ARTIGALAS, BONNEFOY, BROSSEL et CANALÈS, MM. CARDON, CHAILLOU et CHANTREL, Mmes CONCONNE et DANIEL, MM. FICHET et GILLÉ, Mme HARRIBEY, MM. JACQUIN et Patrice JOLY, Mme Gisèle JOURDA, M. KERROUCHE, Mme LINKENHELD, M. LOZACH, Mme LUBIN, MM. MARIE, MÉRILLOU et MICHAU, Mme MONIER, M. MONTAUGÉ, Mme NARASSIGUIN, MM. OUIZILLE, PLA et REDON-SARRAZY, Mme Sylvie ROBERT, MM. ROIRON, ROS, STANZIONE, TEMAL, TISSOT, Mickaël VALLET, Michaël WEBER, ZIANE, FAGNEN et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 3 VICIES |
Après l’article 3 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 2° du I de l’article 726, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – pour les cessions de participations dans des personnes morales exerçant à titre principal ou accessoire une activité agricole au sens de l’article L. 311-2 du code rural et de la pêche maritime » ;
2° L’article 730 bis est ainsi rédigé :
« Art. 730 bis. – Les cessions de gré à gré de parts de groupements agricoles d’exploitation en commun, d’exploitations agricoles à responsabilité limitée mentionnées au 5° de l’article 8 et de sociétés civiles d’exploitation agricole constituées depuis au moins trois ans avant la cession, sont enregistrées au droit fixe de 125 € lorsque l’acquéreur est un associé exploitant qui après l’acquisition contrôle une surface inférieure à une fois et demie la surface agricole utile régionale moyenne fixée dans le schéma directeur régional des exploitations agricoles. Cette surface s’apprécie en additionnant la superficie de tous les biens immobiliers à usage ou à vocation agricole, toutes productions confondues, que la personne physique exploite ou possède, directement ou indirectement par l’interposition d’une ou de plusieurs personnes morales qu’elle contrôle au sens du IV de l’article L. 333-2 du code rural.
« Les cessions de gré à gré de parts de groupements fonciers agricoles, groupements forestiers et groupements fonciers ruraux constitués depuis au moins trois ans avant la cession sont enregistrées au droit fixe de 125 €. »
Objet
En décembre 2021, le Parlement a adopté la « loi d’urgence portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires ». L'objectif était de lutter contre la concentration excessive des exploitations et l'accaparement des terres agricoles, tout en favorisant le modèle des exploitations familiales et l'installation de jeunes agriculteurs. Cependant, malgré la pertinence du diagnostic initial, la loi souffre de lacunes significatives telles que des critères de contrôle peu exigeants, un manque de transparence et un encadrement insuffisant des compensations.
Afin de renforcer cette législation, il est proposé d'introduire un dispositif fiscal visant à garantir la cohérence des politiques publiques. Actuellement, les acquisitions foncières classiques sont soumises à des droits de mutation d'environ 5,80 % avec des taux plus bas pour certains publics (fermiers, attributaires SAFER, par exemple), tandis que la prise de contrôle de foncier agricole par l'acquisition de parts dans des sociétés bénéficie d'une fiscalité nettement plus avantageuse.
En effet, un droit fixe d’enregistrement de 125€ est instauré pour les cessions des parts de groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC), d'exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) non passibles de l'impôt sur les sociétés et de sociétés civiles à objet principalement agricoles constituées depuis au moins trois ans avant la cession (sociétés civiles d’exploitation agricole (SCEA), groupements fonciers agricoles (GFA), groupements forestiers, groupements fonciers ruraux (GFR). La cession des actions des SA et SAS, y compris celles exerçant une activité agricole, est soumise à un droit d’enregistrement de 0,1%. Pour les personnes morales à prépondérance immobilière autres qu’agricoles le droit d’enregistrement des cessions de participations s’élève à 5%.
La distorsion fiscale entre les acquisitions foncières classiques et les prises de participation dans les sociétés exploitant ou possédant du foncier agricole encourage une concentration foncière délétère pour notre souveraineté alimentaire. En effet, les SCEA et autres sociétés participent à un phénomène général de concentration des terres. Selon la FNSAFER, « les lots acquis par les sociétés sont en général 27% plus grands et 5,2 fois plus onéreux que ceux acquis par des personnes physiques ». Cette dynamique sociétaire alimente ainsi la flambée des prix qui peut être observée dans certaines localités, et également la raréfaction des terres disponibles à l’installation. Or rappelons que la France a perdu 100 000 exploitations en 10 ans. Le développement des exploitations sous forme sociétaire, avec une part croissante des capitaux n’appartenant pas à des agriculteurs associés exploitants, peut être également délétère pour nos objectifs environnementaux (lien de causalité entre type d’exploitations et effondrement de la biodiversité), et de notre autonomie alimentaire (les grandes exploitations agricoles sous le contrôle de SCEA ou d’autres sociétés sont en général moins diversifiées, et plus tournées vers l’exportation, et ne correspondent souvent pas aux besoins alimentaires du territoire dans lequel elles sont implantées).
Cet amendement permet d’appliquer une fiscalité plus juste pour cesser les incitations à la concentration et à la financiarisation des terres, au détriment des paysannes et paysans et du dynamisme de nos campagnes. Il propose de porter les droits d’enregistrement à 5% pour les cessions de participations dans des personnes morales exerçant une activité agricole, à titre principal ou accessoire. Pour ne pas pénaliser les exploitations familiales, un droit d’enregistrement fixe à 125€ est maintenu pour les associés exploitants des GAEC, des EARL et des SCEA, sous réserve qu’ils contrôlent après la cession une surface inférieure à une fois et demie la surface agricole utile régionale moyenne fixée dans le schéma directeur régional des exploitations agricoles. Un droit fixe de 125€ est également maintenu pour les cessions de gré à gré des parts de groupements fonciers agricoles (GFA), groupements forestiers et groupements fonciers ruraux (GFR).
Cet amendement a été travaillé en collaboration avec la Confédération paysanne.