Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2024 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 127 , 128 , 132) |
N° I-2094 rect. 23 novembre 2023 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. LOZACH, COZIC, KANNER et RAYNAL, Mmes BLATRIX CONTAT et BRIQUET, M. ÉBLÉ, Mme ESPAGNAC, MM. FÉRAUD, JEANSANNETAS et LUREL, Mmes ARTIGALAS, BONNEFOY, BROSSEL et CANALÈS, MM. CARDON, CHAILLOU et CHANTREL, Mmes CONCONNE et DANIEL, MM. FICHET et GILLÉ, Mme HARRIBEY, MM. JACQUIN et Patrice JOLY, Mme Gisèle JOURDA, M. KERROUCHE, Mmes LINKENHELD et LUBIN, MM. MARIE, MÉRILLOU et MICHAU, Mme MONIER, M. MONTAUGÉ, Mme NARASSIGUIN, MM. OUIZILLE, PLA et REDON-SARRAZY, Mme Sylvie ROBERT, MM. ROIRON, ROS, STANZIONE, TEMAL, TISSOT, Mickaël VALLET, Michaël WEBER, ZIANE, FAGNEN et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ARTICLE 3 SEXVICIES |
Supprimer cet article.
Objet
Le présent article, issu des rangs de la majorité et soutenu par le Gouvernement, prévoit d’exonérer les 34 fédérations sportives internationales reconnues par le Comité international olympique (CIO) de l’impôt sur les sociétés, de la cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, à raison des bénéfices réalisés en France au titre de leurs activités afférentes à leurs missions de gouvernance du sport ou de promotion de la pratique du sport.
Il prévoit également d’exonérer d’impôt sur le revenu les rémunérations versées au titre de ces activités aux salariés de ces fédérations domiciliées en France pour une durée de cinq ans.
Cette disposition fiscale, dont l’impact sur le budget général de l’État n’est pas connu, profiterait principalement à la Fédération internationale de football (FIFA), fondée en France en 1904 et dont le siège est situé à Zurich (Suisse) depuis 1932.
Depuis 2021, cette dernière dispose d’une annexe à l’Hôtel de la Marine à Paris qu’elle souhaite renforcer en y installant une centaine de salariés (contre une vingtaine actuellement). Ce bâtiment, datant du XVIIIe siècle, fut en partie rénové grâce aux fonds du Qatar, pays hôte de la Coupe de monde 2022.
La FIFA milite en faveur d’un cadre fiscal plus favorable, menaçant sinon de quitter la France. Rappelons qu’un rescrit fiscal (négocié fin 2021 avec Bercy) et l’octroi du statut de travailleur détaché, exempte déjà de cotisations sociales en France les salariés du bureau parisien venus de Zurich, tout en leur permettant de conserver leur protection sociale en Suisse durant deux ans.
Sur le plan juridique déjà, le Conseil d’Etat a alerté en septembre dernier du risque que cette mesure puisse introduire une « rupture de l’égalité devant l’impôt », avis consultatif défavorable donc, poussant nos collègues députés à en limiter l’impact dans la durée (ramenée à cinq ans).
Du point de vue fiscal, le dispositif nous apparaît inopportun, quand les salariés actuels de la FIFA payent des impôts en Suisse, tandis que l’instance y bénéficie d’un taux d’imposition sur les bénéfices de 12 %.
Alors que la France traverse une crise économique et sociale majeure obérant ses marges de manœuvre budgétaires, nous ne saurions nous lancer dans une compétition fiscale avec la Suisse afin de favoriser les intérêts d’une association à but non lucratif générant plusieurs milliards d’euros par an. Pour rappel, au terme du cycle commercial 2019-2022, elle affichait un chiffre d’affaires de 7,6 milliards de dollars (6,7 milliards d’euros) et projette, pour le cycle 2023-2026, sur des revenus, hors Coupe du monde des clubs, de 11 milliards de dollars. Elle affiche des réserves financières de près de 4 milliards de dollars. Son président a touché, en 2022, une rémunération annuelle de 3,8 millions d’euros et, cette année, un bonus de 1,66 million d’euros lié à la Mondial au Qatar.
D’autant que la France offre déjà des dispositions fiscales avantageuses aux organisateurs de compétitions internationales (Euro 2016, Coupe du monde de football féminine, Coupe du Monde de Rugby celle de rugby cette année, World Rugby), évènements sportifs qui génèrent en retour d’importantes retombées économiques pour les territoires.
Au niveau géopolitique, une présence plus importante de la FIFA en France ne nous semble ni souhaitable, ni bénéfique, notamment au regard des affaires qui entourent cette instance et du manque de transparence et d’intégrité à l’œuvre dans leurs procédures : soupçons de clientélisme, laxisme dans la défense des valeurs sportives et des droits humains, gouvernance opaque dans l’attribution des compétitions…). Le Parquet National Financier (PNF) a ouvert une instruction judiciaire pour corruption dans le cadre de l’attribution de la Coupe de monde 2022 au Qatar débouchant, à ce stade, sur plusieurs mises en examen, et un mandat d’arrêt international a été émis contre un ancien dirigeant de la FIFA. Son président, Gianni Infantino, fait également l’objet de deux enquêtes pénales en Suisse.
Enfin, le message envoyé à nos bénévoles, lesquels constituent un maillon essentiel du développement du sport en France, et sur qui ces fédérations sportives s’appuient pour prospérer, n’est pas celui que nous voulons promouvoir. Il entre en contradiction avec leur engagement et avec les actions qu’ils mènent.
Cet amendement vise donc à supprimer cet article et ce nouveau régime fiscal.