Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2024 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 127 , 128 , 132) |
N° I-1868 rect. bis 24 novembre 2023 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||||||
Mme Nathalie GOULET, M. CANÉVET et Mme VERMEILLET ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 3 UNVICIES |
Après l'article 3 unvicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2° du b du 2 du B du VI de la section II du chapitre premier du titre IV de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un article 774 … ainsi rédigé :
« Art. 774 …. – I. – Ne sont pas déductibles de l’actif successoral les dettes de restitution exigibles qui portent sur une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit.
« Les dispositions du présent I ne s’appliquent pas aux dettes de restitution contractées sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit, sous réserve qu’il soit justifié que ces dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal, ni aux usufruits qui résultent de l’application des articles 757 ou 1094-1 du code civil.
« II. – Par dérogation aux dispositions de l’article 1133 du présent code, la valeur correspondant à la dette de restitution non-déductible de l’actif successoral mentionnée au I donne lieu à la perception de droits de mutation par décès dus par le nu-propriétaire et calculés d’après le degré de parenté existant entre ce dernier et l’usufruitier, au moment de la succession ou de la constitution de l’usufruit, si les droits dus sont inférieurs.
« Pour la liquidation des droits dus lors de la succession, en vertu du présent II, les dispositions de l’article 784 ne s’appliquent ni sur la valeur des sommes d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit ni sur celle des biens dont le défunt s’était réservé l’usufruit du prix de cession.
« Les droits acquittés lors de la constitution de l’usufruit sont imputés sur les droits dus par le nu-propriétaire, sans pouvoir donner lieu à restitution. »
II. – Le I s’applique aux successions ouvertes à compter de la date de promulgation de la loi de finances pour 2024.
Objet
Le présent amendement vise à renforcer la cohérence de la fiscalité applicable aux usufruits de sommes d’argent, afin de dissuader le recours à des opérations qui sont principalement motivées par un objectif d’optimisation fiscale.
La donation de la nue-propriété d’une somme d’argent est expressément prévue par l’article 587 du code civil. Ce quasi-usufruit donne droit à une créance de restitution pour le donataire égale au montant de la somme donnée.
Les droits dus à raison de la mutation à titre gratuit de la nue-propriété de la somme d’argent sont déterminés par une quotité de la valeur de la pleine propriété, selon le barème prévu à l’article 669 du code général des impôts (CGI) en fonction de l’âge de l’usufruitier au moment de la donation.
L’article 768 du CGI prévoit que, pour la liquidation des droits de mutation par décès, les dettes à la charge du défunt sont déduites lorsque leur existence au jour de l’ouverture de la succession est dûment justifiée par tous modes de preuve compatibles avec la procédure écrite. Par conséquent, la dette de restitution est déduite de l’actif successoral de l’usufruitier en cas de quasi-usufruit.
Toutefois, s’agissant d’un quasi-usufruit, la dette de restitution trouve son origine dans une donation consentie sous réserve d’usufruit qui a donné lieu à une imposition réduite aux droits de mutation à titre gratuit.
Alors que la somme d’argent démembrée n’a été soumise lors de la mutation entre vifs aux droits de donation qu’à raison de la valeur de la nue-propriété, la déduction de l’actif successoral de cette dette pour son montant total en pleine propriété constitue une incohérence qu’il convient de corriger.
En outre, la donation d’une somme d’argent avec réserve d’usufruit s’apparente à une absence de transfert de propriété. Alors que le nu-propriétaire dispose d’un droit réel sur le bien donné dans le cadre d’une donation avec réserve d’usufruit ordinaire, le nu-propriétaire d’une somme d’argent ne détient qu’une créance de restitution à l’égard du quasi-usufruitier, sur son patrimoine. Ce dernier peut donc aliéner la somme d’argent et la consommer comme un propriétaire, alors que le nu-propriétaire ne dispose pas de cette somme en tant que telle.
L’amendement vise à limiter le recours à ce type d’opération en remettant en cause la déductibilité de la dette de restitution de l’actif successoral du quasi-usufruitier et en prévoyant une liquidation des droits de mutation par décès sur la valeur de cette dette par le nu-propriétaire.
La mesure ne s’appliquera pas à l’usufruit résultant d’une transmission par décès par application de l’article 757 du code civil. Elle ne s’appliquera pas davantage aux dettes de restitution contractées sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit, sous réserve qu’il soit justifié que ces dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.
Les droits déjà acquittés par le nu-propriétaire lors de la donation avec réserve d’usufruit seront imputés sur les droits de mutation par décès auxquels il est assujetti. Dans le cas où les droits déjà acquittés seraient supérieurs aux droits dus à raison du décès de l’usufruitier, le surplus ne fera l’objet d’aucune restitution.