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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2024

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 127 , 128 , 132)

N° I-18 rect. bis

27 novembre 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

C Sagesse du Sénat
G Défavorable
Adopté

MM. CAPO-CANELLAS, DEVINAZ, LEVI, MÉDEVIELLE, CUYPERS et BELIN, Mme ROMAGNY, M. CHAUVET, Mme BERTHET, M. PLA, Mmes SOLLOGOUB et PERROT, M. HENNO, Mme de LA PROVÔTÉ, M. DUFFOURG, Mmes GATEL et GUIDEZ, M. VANLERENBERGHE, Mme GACQUERRE, MM. DELCROS, DHERSIN et HINGRAY, Mmes JOSEPH et JACQUEMET et M. FARGEOT


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 16 SEXIES


Après l’article 16 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les compagnies aériennes peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses d’achat de carburants d’aviation durables qu’elles exposent au cours de l’année pour les vols dont les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas soumises aux obligations du système européen d’échange de quotas d’émission instauré par la directive 2003/87/ CE du Parlement et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et modifié par la directive 2023/958 du Parlement et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la contribution de l’aviation à l’objectif de réduction des émissions dans tous les secteurs de l’économie de l’Union et la mise en œuvre appropriée d’un mécanisme de marché mondial. Le taux du crédit d’impôt est de 50 % du surcoût entre l’achat effectif de carburants d’aviation durables et l’achat théorique de kérosène.

Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L ou groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut, sous réserve des dispositions prévues au dernier alinéa du I de l’article 199 ter B, être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements.

II. – Les dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt sont les achats de carburants d’aviation durables et d’autres carburants d’aviation qui ne sont pas dérivés de combustibles fossiles, recensés dans le règlement relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable (ReFuelEU Aviation), exclusivement issus de projets industriels localisés au sein de l’Union européenne, ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

III. – Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d’impôt de l’année au cours de laquelle elles sont remboursées à l’organisme qui les a versées.

Pour le calcul du crédit d’impôt, le montant des dépenses exposées par les entreprises auprès de tiers au titre de prestations de conseil pour l’octroi du bénéfice du crédit d’impôt est déduit des bases de calcul de ce dernier à concurrence :

a) Du montant des sommes rémunérant ces prestations fixé en proportion du montant du crédit d’impôt pouvant bénéficier à l’entreprise ;

b) Du montant des dépenses ainsi exposées, autres que celles mentionnées au a, qui excède le plus élevé des deux montants suivants : soit la somme de 15 000 € hors taxes, soit 5 % du total des dépenses hors taxes mentionnées au II minoré des subventions publiques mentionnées au III.

IV. – Le crédit d’impôt défini au présent article est imputé sur l’impôt sur les bénéfices dû selon des modalités identiques à celles définies aux articles 199 ter B et 223 A et suivants en matière de crédit d’impôt recherche.

V. – Le présent article entre en vigueur, pour une durée de trois ans, à une date fixée par décret qui ne peut être postérieure de plus de trois mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer ce dispositif législatif comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.

VI. – Un bilan de ce crédit d’impôt sera tiré deux ans après l’entrée en vigueur de cet article.

VII. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

VIII – La perte de recettes résultant pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Objet

Le présent amendement vise à inciter les compagnies aériennes à accélérer l’incorporation de carburants d’aviation durables (SAF) au sens du règlement européen ReFuelEU Aviation tout en favorisant l’émergence d’une filière industrielle pérenne et viable en France et en Europe.

Il propose ainsi d’introduire un mécanisme de crédit d’impôt, sur le modèle du crédit d’impôt recherche, pour atténuer le surcoût que représente l’achat de SAF par rapport au kérosène. Il fixe à 50 % le taux du crédit d'impôt sur le surcoût entre l’achat effectif de biocarburants et l’achat théorique de kérosène.

Cet amendement poursuit les conclusions émises par la Mission d’information sur la « Décarbonation des transports : l'urgence de choisir - Développer les filières de carburants et d'hydrogène durables » au mois de juillet 2023. Parmi les différents axes proposés pour accélérer la décarbonation du secteur des transports, le deuxième axe du rapport invitait l’État à « Faire des choix d'accompagnement industriel, économique et social » en soutenant le développement des filières.

À ce titre, cet amendement est une proposition concrète se basant sur la recommandation n°17 dudit rapport proposée par le rapporteur de la Mission d’information Vincent CAPO-CANELLAS qui vise à accompagner l'incorporation de carburants d'aviation durables (SAF) dans le transport aérien par un soutien complet à l'offre et à la demande, en passant par trois mécanismes :

. créer un dispositif de suramortissement à l'adaptation et au renouvellement des aéronefs ainsi qu'aux infrastructures d'avitaillement aéroportuaires, dès le prochain projet de loi de finances initiale ;

. définir une trajectoire pérenne de soutien budgétaire à la production de carburants aériens durables, dans le cadre de la prochaine PPE ;

. et le dernier, celui qui nous intéresse ici, instituer de nouveaux outils de financement de long terme pour l'achat de SAF.

En effet, les objectifs de décarbonation du transport aérien visant la zéro émission nette d’ici 2050 sont désormais clairs et partagés par l’ensemble du secteur. Ils ne seront rendus possible que par un renouvellement des flottes d’aéronefs et l’incorporation de biocarburants durables d’aviation (SAF).

Pour les vols moyens et longs courriers, l’incorporation de SAF semble être la seule solution à moyen terme de décarbonation. Les gains d’émissions de CO2 sont déjà de 70 à 80% pour les technologies existantes, et atteindront jusqu’à 120% pour les fuels synthétiques en développement, intégrant une captation carbone.

Alors qu’un cadre réglementaire national et européen contraignant a été établi à travers un mandat d’incorporation progressif de ces SAF, le secteur peine à se fournir sur le sol européen en carburants d’aviation durable (CAD) par manque de disponibilité en quantité suffisante et à un prix concurrentiel. Aujourd’hui et pour les années à venir, la production de CAD sur le sol européen ne permet pas de répondre aux mandats d’incorporations ce qui poussera les compagnies à se fournir hors de nos frontières, provoquant un terrible manque à gagner et une perte d’indépendance stratégique.

En effet, l’important surcoût que représente l’achat de SAF par rapport au kérosène (entre 3 et 10 fois) constitue un désavantage concurrentiel pour les compagnies aériennes françaises et européennes qui sont plus particulièrement soumises aux mesures du paquet européen « FitFor55 ».

Alors que la France n’a pas encore engagé de mesures d’accompagnement pour la production de CAD en quantité suffisante pour répondre aux objectifs des mandats d’incorporations, les Etats-Unis ont eux décidés d’une stratégie inverse, investissant massivement pour lancer la création d’une filière pérenne et attractive. Une partie du budget de 370 milliards de dollars consacré à des mesures de soutien à la politique industrielle verte des États-Unis prévus par la loi sur la réduction de l’inflation (IRA) est ainsi allouée au développement de cette filière et qui contribue aujourd’hui à ce que la filière américaine propose des CAD deux fois moins chers que la production européenne ou française. La question du prix d’incorporation est une question importante, mais qui n’a pas encore été suffisamment abordée.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.