Direction de la séance |
Projet de loi PLFRSS pour 2023 (1ère lecture) (n° 368 , 375 , 373) |
N° 3148 1 mars 2023 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mmes PONCET MONGE et Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE, BREUILLER et DANTEC, Mme de MARCO et MM. DOSSUS, FERNIQUE, GONTARD, LABBÉ, PARIGI et SALMON ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 9 |
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la possibilité d’abaisser les seuils d’exposition aux facteurs de risques professionnels établis par le décret n° 2017-1769 du 27 décembre 2017 relatif à la prévention et à la prise en compte des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention.
Ce rapport présente notamment plusieurs pistes d’amélioration de la prise en comptes de ces facteurs de risques et notamment leurs implications en termes de dépenses évitées et induites pour les caisses de la sécurité sociale.
Objet
Selon le Rapport sur les objectifs du projet de réforme remis par la première ministre, le gouvernement envisage de baisser certains seuils d’exposition à des risques professionnels comme le travail de nuit, passant de 120 à 100 nuits et le travail en équipes successives alternantes de 50 à 30 nuits. Si ces efforts vont dans le bon sens, cela ne suffit malheureusement pas au regard de l’exposition de nombreux salariés aux risques professionnels et au regard des objectifs de la réforme qui aura pour conséquence, du moins selon les objectifs du gouvernement, une augmentation du nombre de seniors sur le marché du travail (et non en invalidité, au chômage ou en longue maladie).
Pour rappel, la France est un pays où les conditions de travail sont particulièrement difficiles et où l’exposition aux facteurs de risques est bien plus grande que dans les autres pays européens dont on vante seulement l’âge « officiel » de départ à la retraite. Par exemple, selon la chercheuse Dominique Méda, pour plus de 43 % des Français, leur emploi implique de déplacer des charges lourdes contre moins de 30 % aux Pays-Bas et 35 % en Europe. Pour plus de 57 % il implique des positions douloureuses ou fatigantes, contre 43 % en Allemagne et 50 % en Europe. En 2010, selon Serge Volkoff du COR, 38 % des salariés en moyenne sont exposés dans leur travail à au moins une contrainte physique intense, 22% des salariés travaillent au contact d’agents biologiques.
Cette intensification des risques est une réalité dans notre pays et touche d’autant les séniors.
Car la fragilité de l’état de santé augmente avec l’âge et la vulnérabilité face à l’intensification du travail et des rythmes, à des organisations du travail stressantes et aux facteurs de risques s'accroît avec l’âge. A titre d’exemple, selon la DARES, 25 % des accidents du travail en France concernent les salariés de plus de 50 ans alors que ceux-ci représentent 29 % des salariés. 41 % des incapacités permanentes concernent des salariés de plus de 50 ans pour seulement 11 % chez les moins de 30 ans. De la même façon, 58 % des décès concernent les plus de 50 ans contre 8 % chez les moins de 30 ans. A cette augmentation des risques accidentogènes en fonction du vieillissement répond en parallèle l’augmentation de la vulnérabilité face aux risques.
Certes, le Code du travail dispose que l'employeur doit assurer l'adaptation des salariés et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi. Cependant, comme le souligne la Cour des Comptes : « peu d’entreprises considèrent dans les faits que leur responsabilité inclut aussi celle de faire évoluer progressivement en leur sein les travailleurs seniors vers des métiers moins exposés, de manière préventive. ». A cela s’ajoute, toujours selon la Cour, que le système de reconnaissance de la pénibilité est insuffisant, comme la limite des seuils et le plafonnement du nombre de points cumulables au sein du C2P et a fortiori pour les salariés les plus âgés. Sans compter une sous déclaration massive : selon la Cour des Comptes, 2,9 millions de salariés étaient potentiellement exposés à l’ensemble des risques professionnels en 2017 et seulement 750 000 étaient déclarés exposés.
Nous devons donc abaisser tous les seuils d’exposition aux risques et pas simplement ceux concernant le travail de nuit, afin à la fois de permettre la reconnaissance des risques au travail à leur juste valeur et aussi, surtout, de mieux protéger les séniors dont la vulnérabilité face à ces risques est particulièrement élevée. C’est l’objet de cet amendement.