Direction de la séance |
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 (Nouvelle lecture) (n° 151 , 153 ) |
N° 9 rect. 28 novembre 2019 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme BONNEFOY, MM. DAUDIGNY et KANNER, Mmes FÉRET, GRELET-CERTENAIS et JASMIN, M. JOMIER, Mmes LUBIN, MEUNIER et ROSSIGNOL, M. TOURENNE, Mmes VAN HEGHE et ARTIGALAS, MM. LECONTE, MONTAUGÉ, SUEUR, ANTISTE et BÉRIT-DÉBAT, Mmes BLONDIN et CONCONNE, MM. COURTEAU, DURAN, FICHET et GILLÉ, Mmes HARRIBEY et Gisèle JOURDA, M. LALANDE, Mme LEPAGE, M. LUREL, Mmes MONIER, PEROL-DUMONT, PRÉVILLE et TAILLÉ-POLIAN, MM. TEMAL, TISSOT et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et apparentés ARTICLE 46 |
Rédiger ainsi cet article :
I. – Après le chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Dispositions relatives à la réparation intégrale des préjudices directement causés par l’utilisation des produits phytopharmaceutiques
« Section 1
« Réparation des divers préjudices
« Art. L. 253-19. – Peuvent obtenir la réparation intégrale de leurs préjudices :
« 1° Les personnes qui ont obtenu la reconnaissance, au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité, d’une maladie professionnelle occasionnée par les produits phytopharmaceutiques mentionnés à l’article L. 253-1 ;
« 2° Les enfants atteints d’une pathologie résultant directement de leur exposition prénatale du fait de l’exposition professionnelle de l’un ou l’autre de leurs parents à des produits phytopharmaceutiques mentionnés au même article L. 253-1.
« Section 2
« Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques
« Art. L. 253-20. – Il est créé un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, personne morale de droit privé. Il groupe toutes les sociétés ou caisses d’assurances et de réassurances mutuelles agricoles.
« Ce fonds a pour mission de réparer les préjudices définis à l’article L. 253-19. Il est représenté à l’égard des tiers par son directeur.
« Art. L. 253-21. – Le demandeur ou son représentant légal justifient de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et de l’atteinte à l’état de santé de la victime. Il informe le fonds des autres procédures relatives à l’indemnisation des préjudices définis au présent article éventuellement en cours. Si une action en justice est intentée, il en informe le juge de la saisine du fonds.
« En l’absence de déclaration préalable par la victime, le fonds transmet sans délai le dossier à l’organisme concerné au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité. Cette transmission vaut déclaration de maladie professionnelle. Elle suspend le délai prévu à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 253-22 jusqu’à ce que l’organisme concerné communique au fonds les décisions prises. En tout état de cause, l’organisme saisi dispose pour prendre sa décision d’un délai de trois mois, renouvelable une fois si une enquête complémentaire est nécessaire. Faute de décision prise par l’organisme concerné dans ce délai, le fonds statue dans un délai de trois mois.
« Le fonds examine si les conditions d’indemnisation sont réunies. Il recherche les circonstances de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et ses conséquences sur l’état de santé de la victime ; il procède ou fait procéder à toutes investigation et expertise utiles sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou le secret des affaires.
« Au sein du fonds, une commission médicale indépendante se prononce sur l’existence d’un lien entre l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et la survenue de la pathologie. Sa composition est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, des outre-mer et de l’agriculture.
« Vaut justification de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques la reconnaissance d’une maladie professionnelle occasionnée par ces produits au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.
« Vaut également justification du lien entre l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et le décès la décision de prise en charge de ce décès au titre d’une maladie professionnelle occasionnée par des produits phytopharmaceutiques en application de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.
« Dans les cas valant justification de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques mentionnés aux deux alinéas précédents, le fonds peut verser une provision si la demande lui en a été faite. Il est statué dans le délai d’un mois à compter de la demande de provision.
« Le fonds peut demander à tout service de l’État, collectivité publique, organisme assurant la gestion des prestations sociales, organisme assureur susceptibles de réparer tout ou partie du préjudice, la communication des renseignements relatifs à l’exécution de leurs obligations éventuelles.
« Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d’autres fins que l’instruction de la demande faite au fonds d’indemnisation et leur divulgation est interdite. Les personnes qui ont à connaître des documents et informations fournis au fonds sont tenues au secret professionnel.
« Le demandeur peut obtenir la communication de son dossier, sous réserve du respect du secret médical, du secret professionnel et du secret des affaires.
« Art. L. 253-22. – Dans les neuf mois à compter de la réception d’une demande d’indemnisation, le fonds présente au demandeur une offre d’indemnisation. Il indique l’évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. À défaut de consolidation de l’état de la victime, l’offre présentée par le fonds a un caractère provisionnel.
« Le fonds présente une offre dans les mêmes conditions en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime.
« L’offre définitive est faite dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle le fonds a été informé de cette consolidation.
« Le paiement doit intervenir dans un délai d’un mois à compter de la réception par le fonds de l’acceptation de son offre par la victime, que cette offre ait un caractère provisionnel ou définitif.
« L’acceptation de l’offre ou la décision juridictionnelle définitive rendue dans l’action en justice prévue à l’article L. 253-23 vaut désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice. Il en va de même des décisions juridictionnelles devenues définitives allouant une indemnisation intégrale pour les conséquences de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques.
« Art. L. 253-23. – Le demandeur ne dispose du droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation que si sa demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 253-22 ou s’il n’a pas accepté l’offre qui lui a été faite.
« Cette action est intentée devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le domicile du demandeur.
« Art. L. 253-24. – Le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes.
« Le fonds intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, notamment dans les actions en faute inexcusable, et devant les juridictions de jugement en matière répressive, même pour la première fois en cause d’appel, en cas de constitution de partie civile du demandeur contre le ou les responsables des préjudices. Il intervient à titre principal et peut user de toutes les voies de recours ouvertes par la loi.
« Si le fait générateur du dommage a donné lieu à des poursuites pénales, le juge civil n’est pas tenu de surseoir à statuer jusqu’à décision définitive de la juridiction répressive.
« La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, à l’occasion de l’action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime en application de la législation de sécurité sociale. L’indemnisation à la charge du fonds est révisée en conséquence.
« Art. L. 253-25. – Le fonds est financé par :
« 1° L’affectation d’une fraction du produit de la taxe prévue à l’article L. 253-8-2 ;
« 2° Une contribution de l’État prenant la forme d’une affectation de recettes dans des conditions et montants fixés chaque année par la loi de finances ;
« 3° Les sommes perçues en application de l’article L. 253-24 ;
« 4° Les produits divers, dons et legs.
« Art. L. 253-26. – Les demandes d’indemnisation doivent être adressées au fonds dans un délai de dix ans.
« Pour les victimes, le délai de prescription commence à courir à compter de :
« – pour la maladie initiale, la date du premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l’exposition aux produits phytopharmaceutiques ;
« – pour l’aggravation de la maladie, la date du premier certificat médical constatant cette aggravation dès lors qu’un certificat médical précédent établissait déjà le lien entre cette maladie et une exposition aux produits phytopharmaceutiques.
« Art. L. 253-27. – L’activité du fonds fait l’objet d’un rapport annuel remis au Gouvernement et au Parlement avant le 30 avril.
« Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Le VI de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« VI. – Le produit de la taxe est affecté :
« 1° En priorité, à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, dans la limite du plafond fixé au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, pour financer la mise en place du dispositif de phytopharmacovigilance défini à l’article L. 253-8-1 du présent code et pour améliorer la prise en compte des préjudices en lien direct avec l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ;
« 2° Pour le solde, au Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. »
III. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.
Par dérogation, pour les demandes présentées au fonds en 2020 en application du 2° de l’article L. 253-19 du code rural et de la pêche maritime, le délai prévu à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 253-22 du même code est porté à douze mois.
Objet
Cet amendement du groupe socialiste reprend le dispositif proposé en première lecture tendant à instituer un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, complété par les dispositions proposées par la commission des affaires sociales.
Cet amendement transpartisan vise, en effet, à réécrire l’intégralité de l’article 46 afin de reprendre le contenu de la proposition de loi portant création d'un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytophamarceutiques, déposée par le groupe socialiste du Sénat et adoptée à l'unanimité à la Haute Assemblée de la République le 1er février 2018 ainsi que lors de la loi de finances pour 2019.
Ce fonds permettrait la prise en charge de la réparation intégrale des préjudices des personnes atteintes de maladies liées à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques par la création d'un fonds d'indemnisation abondé par les fabricants de ces produits. Cet amendement inclut l’indemnisation des enfants touchés in utero. Il propose également une participation de l’État au financement du fonds.
En effet, les auteurs de cet amendement, à l’instar des associations de victimes, estiment que le dispositif proposé par le Gouvernement n’est pas suffisant car il prévoit une simple extension du régime de prise en charge des maladies professionnelles pour les agriculteurs salariés et non-salariés, ainsi qu’une prise en charge « forfaitaire » qui n’assurera pas une réparation intégrale des préjudices subis.
Il s’agit ainsi de proposer sous une forme unique un dispositif complet.