Direction de la séance |
Projet de loi constitutionnelle Protection de la Nation (1ère lecture) (n° 395 , 447 ) |
N° 58 14 mars 2016 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. NÉRI ARTICLE 2 |
Rédiger ainsi cet article :
Le deuxième alinéa de l'article 34 de la Constitution est ainsi rédigé :
« – la déchéance de citoyenneté impliquant la dégradation des droits civiques, civils sociaux et familiaux est prononcée à l'encontre de toute personne condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la Nation et à la République ; ».
Objet
La France a été frappée à plusieurs reprises par des actes de terroristes, se revendiquant de l'organisation Daesh. Ces terroristes, hommes et femmes, ont attaqué notre République suscitant une condamnation unanime. Symboliquement, cette condamnation peut se trouver traduite dans le texte fondateur de la République pour marquer l'union de la Nation contre le terrorisme.
Il s'agit d'inscrire dans l'article 34 de la Constitutions la déchéance de citoyenneté qui s'accompagne de la déchéance des droits civiques, civils sociaux et familiaux et réintégrer par là même dans notre droit la notion de peine infamante.
En effet, l'idée d'exclure de la communauté civique des individus ayant rompu avec ses valeurs n'est pas nouvelle.
Elle a été mise en oeuvre dès la Révolution, et plus récemment à la Libération pour punir les actes de collaboration, et ce sous diverses dénominations allant du crime de ‹‹ lèse-nation ›› à celui ‹‹ d'indignité nationale ››.
Ainsi, l'ordonnance du 26 août 1944 prévoyait l'application d'une peine de dégradation nationale pour punir le crime d'indignité nationale, qui entraînait la privation de tous les droits civils, civiques et familiaux ainsi que de multiples interdictions professionnelles et l'interdiction de se rendre dans certaines zones.
Directement lié à la période 1940-1944 et à l'épuration, ce chef d'accusation n'a pratiquement pas été utilisé après la loi d'amnistie de 1951. Sans avoir été formellement abrogée, cette incrimination s'est éteinte par désuétude. Sans qu'aucun obstacle ne s'y oppose, la réactivation de cette incrimination semble inopportune comme le souligne le rapport d'information du 25 mars 2015 de la commission des Lois de l'Assemblée Nationale.
Il nous semble dès lors plus judicieux de retenir une autre solution juridique dépourvue d'anachronisme en promouvant la dégradation citoyenne.
Depuis l'entée en vigueur de Code Pénal de 1992, cette dégradation civique prend la forme ‹‹ d'une interdiction des droits civiques, civils, et de famille ››. Elle est applicable, comme peine complémentaire, aux auteurs des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation (article 414-5) ou constituant des actes de terrorisme (article 422-3). Elle porte sur le droit de vote, l'éligibilité - ce qui emporte incapacité d'exercer une fonction publique - , le droit de témoigner en justice, le droit d'être tuteur ou curateur, etc.(article 131-26).
Nous souhaitons requalifier cette interdiction en dégradation, et en inscrire le principe dans la Constitution. Cela marquerait le caractère infamant de cette peine, sorte de ‹‹ mort civique symbolique ››, qui serait tout aussi fort que dans le cadre de la déchéance de nationalité.
Remplacer la déchéance de nationalité par la dégradation civique aurait notamment pour avantage d'abolir toute inégalité entre les Français, qu'ils soient binationaux nés Français ayant acquis la nationalité française, ou mono nationaux, et tout cela en évitant la création d'apatrides.
Ainsi, alors que la déchéance de nationalité serait une mesure inefficace car à la portée terriblement réduite, la peine de déchéance de Citoyenneté pourrait s'appliquer à tous.