Direction de la séance |
Projet de loi Croissance, activité et égalité des chances économiques (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 371 , 370 ) |
N° 647 rect. 7 avril 2015 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. JARLIER, Mme LOISIER, M. Daniel DUBOIS, Mme GATEL et MM. ROCHE, GUERRIAU et Loïc HERVÉ ARTICLE 27 BIS |
Supprimer cet article.
Objet
L’article 27 bis du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques est issu d’un amendement adopté sans étude d’impact.
Cet article abroge l’article L.553.4 du code de l’environnement qui fixe pour les tiers, personnes physiques ou morales, les communes ou leurs groupements, le délai de recours administratif contre les décisions afférentes aux éoliennes industrielles en raison des inconvénients ou dangers que le fonctionnement de telles installations présentent pour les intérêts visés à l’article L.511-1 du même code, à six mois à compter de la publication ou de l’affichage.
Il insère un article I bis après le I de l’article L.514.6 dudit code :
- en limitant à 2 mois pour les tiers, le délai de recours contre les décisions concernant les installations de production d’origine renouvelable, dont en conséquence les éoliennes industrielles,
- en supprimant l’affichage de la décision comme point de départ du délai de recours,
- en supprimant la référence aux intérêts environnementaux visés à l’article L.511-1 précité.
Cet article 27 bis (nouveau) ne saurait être maintenu car :
I- il est contraire à l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme puisqu’il supprime purement et simplement l’accès au juge pour les victimes des inconvénients et dangers provoqués par le fonctionnement des éoliennes industrielles :
- jamais en effet un parc éolien n’est susceptible d’être mis en exploitation dans le délai de deux mois de la publication de l’autorisation d’exploiter ; demain de l’autorisation unique!
- jamais, dans les territoires ruraux, les particuliers ne connaissent en temps réel l’effectivité d’une publication de décisions administratives concernant des installations industrielles à l’état de projet pendant des mois, voire des années !
L’alignement du délai de recours éolien sur celui du droit de l’urbanisme rend tout recours illusoire.
En instaurant une forclusion après deux mois d’une simple publication administrative, avant tout fonctionnement de l’installation en cause, l’article 27 bis vient en violation du principe conventionnel selon lequel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par la justice.
II- Il vient en violation du principe d’égalité devant la loi, au principe d’isonomie, puisqu’il instaure un moindre délai de recours, un délai dérisoire, pour les riverains des parcs éoliens au regard du droit des riverains des autres installations classées pour la protection de l’environnement.
Pour ces dernières, le délai de recours des tiers est d’un an à compter de la publication ou de l’affichage de la décision d’exploiter. Ce délai est prorogé de six mois à compter de cette mise en service, si celle-ci n’est pas intervenue dans le délai de six mois de la publication ou de l’affichage.
La limitation, pour les éoliennes industrielles soumises au régime ICPE du délai de recours, des personnes physiques, à deux mois de la publication de l’autorisation administrative emporte une rupture d’égalité prohibée par l’article 7 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme selon lequel « tous sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection de la loi », ce dont relève le droit d’accès au juge.
Cette limitation vient aussi en violation de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon laquelle la loi doit être la même pour tous.
Au lieu d’accepter l’article 27 bis du projet, il serait plus conforme aux obligations internationales de la France et aux principes constitutionnels français que votre assemblée supprime le régime dérogatoire défini à l’article L.553-4 du code de l’environnement et soumette les centrales éoliennes au droit commun des recours ICPE.
III- il vient en violation du principe de non régression du droit de l’environnement puisqu’il supprime pour les éoliennes industrielles toute possibilité de sanction par le juge du principe de protection des intérêts visés à l’article L.511-1 du code de l’environnement, à savoir la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publique, l’agriculture, la nature, l’environnement et les paysages, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la conservation des sites et des monuments ainsi que les éléments du patrimoine archéologique.
Les éoliennes industrielles, machines actives de plus de 180 mètres désormais, portent atteinte au droit de chacun à un environnement sain du fait du bruit constant qu’elles génèrent, de leur effets stroboscopiques, de leurs clignotements lumineux, de leur domination du cadre de vie des riverains. L’atteinte à la sécurité, notamment du fait de la proximité de routes et chemins, et la banalisation de paysages magnifiques ne sont pas les moindres maux.
Contrairement à ce que soutient le groupe EELV les parcs éoliens ne sont que cas particuliers au regard de la diversité des territoires.
IV il vient, concernant les territoires ruraux, en violation des objets mêmes du projet de loi, à savoir la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques : l’industrialisation éolienne qui profite aux seuls groupes financiers au détriment des consommateurs finaux d’électricité et des contribuables, se révèle non créatrice d’emplois locaux pérennes, dévastatrice de l’économie touristique des territoires ruraux. Elle accentue la désertification de ces territoires du fait de la dévalorisation de leur patrimoine naturel et bâti, de l’écrasement, la banalisation de leurs paysages, la dégradation de l’environnement.
La précipitation en l’espèce dans l’allégement des procédures a fait perdre aux promoteurs de l’article 27 bis qui vous est soumis, toute vision des objectifs poursuivis par le projet de loi.