Direction de la séance |
Projet de loi Représentation devant les cours d'appel (1ère lecture) (n° 140 , 139 ) |
N° 26 rect. 18 décembre 2009 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||||||
MM. FOUCHÉ, LEFÈVRE, Paul BLANC, CHATILLON, HOUPERT, BERNARD-REYMOND et BEAUMONT ARTICLE 17 |
I. - Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 8
Remplacer les mots :
est déduit
par les mots :
n'est pas déduit
Objet
L'article 17 traite des modalités d'indemnisation des avoués près les Cours d'appel dont les offices seront supprimés.
Son 4e alinéa dispose que « lorsque l'avoué demande ce remboursement anticipé [des dettes qu'il a contractées pour acheter son office], le montant de l'acompte est fixé après déduction du montant du capital restant dû ».
Son 8e alinéa précise que « lorsque l'avoué a bénéficié du remboursement anticipé du capital restant dû au titre des prêts d'acquisition de l'office ou de parts de la société d'exercice, le montant de ce capital est déduit du montant de l'indemnité due en application de l'article 13 ».
En clair, cela signifie que l'indemnité versée pour suppression d'office sera amputée des dettes non encore remboursées contractées pour l'achat de l'office.
Ce dispositif est contraire à l'exposé des motifs ; il est contraire au principe d'égalité de l'indemnisation ; il est contraire à la justice sociale la plus élémentaire. Il est enfin contraire au droit communautaire, et donc à la sécurité juridique.
1- Contraire à l'exposé des motifs du projet de loi puisque celui-ci affirme (p. 5) qu'«une attention toute particulière est accordée aux avoués titulaires d'un prêt contracté en vue de l'acquisition de leur office ou de parts de société d'exercice», et de manière ambiguë que «pour leur éviter une situation financière délicate, l'État se substituera à eux dans le remboursement du capital restant dû». Or, en fait, l'État ne se substitue pas puisque ce remboursement est déduit de l'indemnité due. Tout au plus peut-on admettre qu'il consent une avance de trésorerie.
2- Contraire au principe d'égalité puisque l'indemnité à laquelle chaque avoué a vocation en application de l'article 13 du projet sera, s'agissant des seuls avoués encore endettés, absorbée en tout ou partie par le montant du capital restant dû.
Ce dispositif indemnitaire est d'autant plus injuste que, précisément comme le souligne l'exposé des motifs précité, les avoués encore endettés seront, objectivement, les plus sévèrement touchés par la réforme puisqu'il s'agit, sauf exceptions :
§ des professionnels les plus jeunes,§ qui, par définition, n'ont pas disposé d'un patrimoine leur permettant d'effectuer un apport personnel pour accéder à la profession,§ qui, encore en cours de remboursement, n'ont pu parvenir à la constitution d'un patrimoine personnel,§ pour lesquels le préjudice de fonction sera le plus lourd puisque leur carrière, de 20 à 40 ans en moyenne, reste devant eux, et devra, sans autre choix, être entièrement refondée dans un contexte global difficile (reconversion délicate dans la profession d'avocat, qui n'est pas la leur, et sans aucune clientèle propre; remise en cause de l'ensemble des statuts des officiers publics et ministériels, dont l'accès sera dans tous les cas plus théorique qu'effectif; nombre extrêmement limité d'intégrations dans le corps de la magistrature, et encore uniquement aux fonctions de second grande de la hiérarchie judiciaire - art. 22 Ord. 22.12.58),§ et qui, alors qu'ils assument, pour la plupart, la charge de leurs famille et notamment de jeunes enfants, seront obligés de se former à un nouveau métier et seront donc privés de ressources les premières années.
Alors que chaque avoué a vocation à percevoir une indemnité identique en application de l'article 13 du projet de loi, la déduction opérée par l'article 17-8° aura ainsi pour effet de priver les seuls avoués endettés de tout ou partie de ce droit. En conséquence, l'avoué endetté se trouve défavorisé au regard du sort réservé à son confrère non endetté.
Le vœu d' « attention toute particulière » qu'exprime l'exposé des motifs est donc un leurre. Le mécanisme mis en place par le projet de loi induit un résultat diamétralement opposé au but poursuivi.
3- Le dispositif est contraire à la justice sociale la plus élémentaire puisqu'il pénalise les avoués qui ont dû emprunter pour acheter leurs études tandis que ceux qui disposaient de fonds personnels suffisants n'ont pas eu à emprunter et toucheront leur indemnité au taux plein...
L'égalité, et la justice, qui doivent présider à la définition des modalités d'indemnisation, imposent donc de prendre en considération la particularité du préjudice des avoués encore endettés, pour que chaque avoué perçoive, au titre de l'article 13, une valorisation identique de ses parts et de son office, nette de toute charge d'emprunt professionnel.
4- Le dispositif est enfin contraire à la sécurité juridique, car il contrevient aux exigences du droit communautaire; notamment au principe d'égalité, et à la nécessaire prise en compte des situations individuelles (Conv. EDH, notamment article 1er du premier protocole additionnel, et jurisprudence CEDH, arrêt Lallement c/ France).
C'est pour l'ensemble de ces motifs qu'il vous est demandé de supprimer l'alinéa 4 de cet article 17 et de donner une nouvelle rédaction à son alinéa 8.
Cela sans préjudicier à la nécessaire indemnisation de l'ensemble des postes de préjudice, et notamment du préjudice de carrière.