Direction de la séance |
Projet de loi Récidive des majeurs et des mineurs (1ère lecture) (URGENCE) (n° 333 rect. , 358 ) |
N° 11 2 juillet 2007 |
Exception d'irrecevabilitéMotion présentée par |
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Mmes BORVO COHEN-SEAT, MATHON-POINAT, ASSASSI et les membres du groupe communiste républicain et citoyen TENDANT À OPPOSER L'EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ |
Objet
Les auteurs de cette motion de procédure souhaitent démontrer que, malgré les précautions rédactionnelles prises par le Gouvernement afin de ne pas faire encourir la censure de ce projet de loi par le Conseil Constitutionnel, celui-ci n'en porte pas moins atteinte à plusieurs principes constitutionnels.
Les articles 1er et 2 du projet de loi, instaurant des peines minimales obligatoires, remettent ainsi partiellement en cause l'article 66 de la Constitution et le principe de l'individualisation des peines.
C'est l'inversion de nos principes fondamentaux qui est ici présentée. En effet, le juge devra désormais motiver la liberté mais non l'emprisonnement. L'autorité judiciaire est pourtant « gardienne de la liberté individuelle ».
Par ailleurs, s'agissant du régime d'application des peines automatiques, certes le juge pourra déroger à ces peines minimales, en cas de première récidive, « en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. En cas de deuxième récidive, les conditions de la dérogation sont encore plus strictes puisque celle-ci n'est possible que « si le prévenu présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion ».
Mis à part le fait que ces garanties « exceptionnelles » n'existent pas actuellement dans le code de procédure pénale et que seules existent les garanties d'insertion et de réinsertion en matière d'application des peines, elles seront non seulement difficiles à qualifier mais surtout impossibles à réunir au moment du prononcé de la peine.
Dans les faits, les juges ne pourront pas ou difficilement déroger aux peines minimales, ce qui apparaît donc contraire au principe de l'individualisation des peines et à l'article 66 de la Constitution.
En ce qui concerne les dispositions applicables aux mineurs, une inversion des principes est une nouvelle fois mise en oeuvre. L'emprisonnement prime sur l'éducatif. En effet, le projet de loi prévoit dans son article 3 de nouvelles dérogations au principe de l'atténuation de responsabilité pénale. Elle est même supprimée pour les mineurs de plus de 16 ans en cas de seconde récidive, sauf décision spécialement motivée. Les peines minimales obligatoires seront applicables aux mineurs dès 13 ans : là encore des dérogations sont possibles mais dans les faits, le principe devient l'emprisonnement quasi systématique des mineurs récidivistes.
De ce fait, l'article 3 apparaît contraire à la Constitution, le Conseil Constitutionnel ayant reconnu la valeur constitutionnelle de l'atténuation de responsabilité pénale et plus généralement de la spécificité de la justice des mineurs. Il semble entrer également en contradiction avec l'article 37 de la Convention internationale des droits de l'enfant.
Pour ces raisons, l'irrecevabilité de ce projet de loi paraît manifestement fondée.