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Direction de la séance

Projet de loi constitutionnelle

organisation décentralisée de la République

(2ème lecture)

(n° 83 , 86 )

N° 2

10 décembre 2002


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

MM. PEYRONNET, BEL, CHARASSE et COURTEAU, Mme DURRIEU, MM. DREYFUS-SCHMIDT, DAUGE, FRIMAT, FRÉCON, LAGAUCHE, LISE, MARC, MAUROY, RAOUL, SUEUR

et les membres du Groupe socialiste et rattachée


ARTICLE 3


Supprimer cet article.

Objet

Instituer dans la Constitution une primauté d'examen en faveur du Sénat pour « les projets de loi ayant pour principal objet l'organisation des collectivités territoriales et les projets de loi relatifs aux instances représentatives des Français établis hors de France » est injustifié, et inutile.

En outre, limitant justement la portée de cet article, l'Assemblée nationale n'a pas pour autant remédié à l'insécurité juridique du dispositif proposé, bien au contraire. Une telle insécurité juridique est incompatible avec la rigueur et la clarté qu'on est en droit d'attendre d'un texte constitutionnel.

Ni le bicamérisme, ni le fait que le Sénat représente les collectivités territoriales ne le justifient. Jusqu'alors, la Constitution ne prévoit de priorité d'examen au profit de l'Assemblée nationale qu'en matière de lois de finances ou de lois de financement de la sécurité sociale, et ce au nom du principe selon lequel les représentants directs du peuple peuvent consentir à l'impôt. Hormis ces cas, tout projet de loi peut être indifféremment déposé devant l'une ou l'autre des deux assemblées du Parlement. Rien n'interdit donc à un Premier ministre, lorsqu'il l'estime justifié, de saisir le Sénat en priorité d'un texte relatif à l'organisation des collectivités territoriales, ce qui se produit souvent et ce qui est tout à fait légitime.

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale pour cet article n'apporte aucune réponse au problème de fond : les difficultés d'interprétation et de mise en œuvre de ce dispositif, pourtant, unanimement reconnues que ce soit par le Conseil d'Etat, le rapporteur de notre commission des Lois ou bien encore par les deux rapporteurs de la commission des lois et de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, n'ont pas été levées.

En effet, cette nouvelle rédaction n'apporte pas d'améliorations substantielles, si ce n'est une précision concernant la garantie expresse du droit d'amendement ; elle suscite même de nouvelles incertitudes .

Après que notre rapporteur ait lui-même souligné en première lecture, les difficultés à définir la notion de « principal objet », le rapporteur pour avis de l'Assemblée nationale, notamment, a, à son tour mis l'accent sur ce point. Il a, par exemple, souligné que si l'on trouve dans la jurisprudence du Conseil Constitutionnel des éléments relatifs à l'objet d'un projet de loi, au contenu, aux intitulés et même à l'exposé des motifs, la notion de "principal" objet n'apparaît toutefois jamais. Quels critères seront retenus : critères qualitatifs, quantitatifs ?

Enfin, souhaitant légitimement, limiter le champ d'application de la priorité d'examen instaurée en faveur du Sénat, l'Assemblée nationale a substitué aux termes de « libre administration des collectivités territoriales, leurs compétences ou leurs ressources », les termes « l'organisation des collectivités territoriales ».

Cette rédaction certes plus restrictive, soulève de nouveaux problèmes d'interprétation et ajoute à l'insécurité juridique.

La définition du terme « organisation » est incertaine, tant en ce qui concerne le sens à lui donner, que sa portée :

- La définition qui en est donnée est fragile, incertaine et inquiétante. Il suffit de lire le rapport de notre commission des Lois, qui résume ainsi les débats de l'Assemblée nationale sur ce point, pour s'en convaincre : « Se référant à la structure du Code général des collectivités territoriales, M. Pascal Clément, (…) a déclaré en séance publique que l'organisation des collectivités territoriales concernait le choix de leur nom, la détermination des règles relatives à leurs organes et à leurs actes, ainsi que la fixation de leurs limites territoriales. »(…)  « Confirmant son analyse, M. Dominique Perben (   ) a indiqué que cette notion ne recouvrait pas les modes de scrutin. »

- La question de savoir si les projets de loi ayant pour principal objet l'organisation de la Nouvelle-Calédonie, devront être déposés en priorité au Sénat se pose. En effet, la Nouvelle-Calédonie figure bien dans le titre XIII mais elle se trouve également dans le titre XII relatif aux collectivités territoriales. Le Garde des Sceaux a estimé, sous réserves de vérification, que ces projets de lois ne devraient pas obligatoirement être soumis à l'obligation de dépôt en premier lieu au Sénat, ce qui apparaît en contradiction avec la déclaration de la Ministre de l'outre-mer pour qui la Nouvelle-Calédonie est une collectivité territoriale. La confusion et l'incertitude est telle, que notre rapporteur précise qu'il interrogera le Gouvernement sur ce point.

Telles sont les raisons notamment qui motivent cet amendement de suppression.